Les producteurs anticipent une contraction du marché de la musique enregistrée et un impact à moyen terme

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La croissance du marché de la musique enregistrée en France dépend du streaming payant et du maintien du segment physique. Mais la consommation de la musique n’est pas exempte des répercussions de la crise. Les pertes enregistrées sont colossales. Et les prévisions pour 2020 sont loin de rassurer les producteurs.

Les conséquences de la crise sanitaire et économique ont été immédiates sur le secteur de la musique enregistrée. Une étude d’impact a été réalisée par le cabinet EY pour les deux syndicats majeurs fédérant les producteurs, le SNEP et l’UPFI. Les pertes causées durant les deux mois de confinement sont évaluées à 45 millions d’euros soit l’équivalent de 40% du chiffre d’affaires prévisionnel du marché. En première ligne des dommages, les ventes physiques, dont les pertes sont établies à 25,8 millions d’euros sur la période et la baisse chiffrée à 88%. Outre le fait que les habitudes de consommation aient été bouleversées par le contexte sanitaire, les ventes d’albums en physique se sont mécaniquement effondrées en raison notamment de la fermeture des enseignes de biens et produits culturels, des disquaires. L’actualité combinée à l’arrêt de l’écosystème ont contraint les labels à repousser certaines sorties d’albums, pour en assurer l’exploitation en bonne et due forme avec des stratégies marketing optimales (tournages de clips, partenariats avec les marques, exposition dans les médias, communication sur les réseaux sociaux). Autre segment impacté, les droits voisins des producteurs phonographiques avec des pertes évaluées à 7,9 millions d’euros, suite à l’annulation des concerts et festivals. Et le manque à gagner n’a pas été compensé par le digital, lui-même confronté à une baisse de 11% (7,8 M€), malgré le rebond de la consommation sur les plateformes de streaming après le début du confinement. En cause, les pertes en termes de revenus publicitaires sur le streaming, qui s’élèvent à 7,8 millions d’euros selon l’étude EY. Le manque à gagner est de 4 millions d’euros sur YouTube, et de 3,3 millions d’euros sur Deezer et Spotify.

Plus de 100 millions d’euros de pertes

Alors que le marché de la musique enregistrée a consolidé sa croissance en 2019 à 772,5 M€ (+5,4%), la contraction semble inévitable pour 2020. Les pertes pour le secteur sont, au mieux, estimées à 120 millions d’euros, et dans le scénario d’une lente reprise, pourraient s’établir à 166 millions d’euros. Le manque à gagner occasionné par la baisse des ventes d’albums en physique devrait être 66 et 100 millions d’euros soit environ la moitié des pertes. S’y ajoutent environ 20 millions d’euros sur le digital, et 26,7M€ en termes de perceptions de droits voisins.

Le crédit d’impôt comme levier

Les conséquences de la contraction du marché en 2020, si elle se confirme, vont bien au-delà de la pérennité du secteur de la musique enregistrée et de la baisse des revenus des majors, labels indépendants et des artistes. Les pertes pourraient se répercuter sur la capacité des producteurs à réinvestir sur la création et notamment les nouveaux talents. Or, ces dernières années, la croissance du marché et la vitalité du paysage musical ont été impulsés par l’émergence de nouveaux artistes qui en 2019 représentaient 46 des 200 meilleures ventes d’albums. La visibilité financière étant essentielle pour investir et réinvestir, les producteurs demandent la sanctuarisation et le renforcement du crédit d’impôt dédié à la production phonographique.

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