Le dilemme du Gouvernement sur l’organisation des concerts-tests

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L’instabilité du contexte sanitaire constitue la principale entrave à la reprise d’un certain nombre d’activités culturelles, dont les concerts et festivals, et est de fait la principale raison de la prudence du Gouvernement. A défaut d’une vaccination massive des français d’ici l’été, les premiers concerts-tests en France semblent être un passage obligé avant la réouverture des salles de concert qui acterait la reprise du secteur de la musique live. La filière l’a bien compris, et adapte sa stratégie pour tenter de convaincre le Gouvernement et les pouvoirs publics que la reprise des concerts peut converger avec les impératifs d’ordre sanitaire.

Près de cinq mois après la reprise qui devait avoir lieu en septembre, la politique déployée par le Gouvernement, malgré des difficultés et réalités compréhensibles sur le plan sanitaire, n’offre pas de visibilité pour le secteur. La présence d’un public à la cérémonie des Victoires de la Musique le 12 février serait un signal fort adressé aux entreprises, aux professionnels de tous corps de métiers, aux artistes et aux publics. Une marque d’optimisme pour tous les français qui aurait son importance étant donné leur lien avec la musique. C’est l’objectif en ligne de mire de la filière, afin d’installer les prémices d’une reprise pour le secteur de la musique live. Outre les multiples acteurs du secteur comme ceux dépendant de l’activité de la musique live et du spectacle vivant, certaines entreprises du domaine de la santé et engagées dans la lutte contre la pandémie y trouvent également leurs intérêts. D’où l’initiative portée par le laboratoire américain Innova Medical Group, le cabinet spécialisé dans les études sanitaires PH Expertise et l’association des Victoires de la musique pour l’accueil d’un public. Un protocole sanitaire a donc été établi pour permettre, suite à la réalisation de tests antigéniques avant et après l’évènement, à 1 300 personnes d’assister à la cérémonie du 12 février au sein de la Seine Musicale, donc en lieu clos. L’objectif est évidemment de mesurer la propagation du virus dans le cadre d’un évènement culturel, et in fine, de démontrer que la réouverture des lieux culturels constituerait un risque limité voire nul de clusters. L’expérimentation, conditionnée aux autorisations des pouvoirs publics, a été proposée à la Préfecture de Police de Paris et au Gouvernement le 28 janvier. La date serait d’ailleurs symbolique, près d’un an après l’interdiction des concerts de plus de 5 000 personnes datant du 29 février 2020, et l’interdiction des concerts de plus de 1 000 personnes, prononcée par arrêté le 7 mars 2020.

DES INITIATIVES MISES EN PÉRIL A COURT-TERME

Le Premier Ministre sera donc amené dans les prochains jours à se prononcer sur l’organisation de ce premier « concert-test » en France. Suite au succès d’une opération à Barcelone en décembre la Ministre de la Culture, Roselyne Bachelot, avait fait part de son intérêt pour la démarche sans pour autant donner une quelconque indication quant à l’autorisation du Gouvernement. Outre l’expérimentation portée par les Victoires de la Musique, le PRODISS, premier syndicat du spectacle vivant musical, et le SMA, autre syndicat fédérant des TPE et PME du secteur, sont associés à divers projets de concerts-tests à Paris et à Marseille. Cependant, les multiples initiatives portées par la filière apparaissent d’ores-et-déjà à contre-courant de la politique déployée par le Gouvernement, associée à des restrictions pour divers secteurs de l’économie, en raison de l’aggravation du contexte sanitaire. Et ce, d’autant plus à l’heure où un reconfinement devrait être annoncé par le Président de la République dans les prochains jours. Mais en même temps, ne pas autoriser une expérimentation dans le cadre des Victoires de la musique, même dans une moindre mesure c’est-à-dire avec un public inférieur à 1 300 personnes, serait un mauvais signal envoyé au secteur de la musique live et globalement du spectacle vivant, qui demandent certes un soutien financier pour la reprise et la relance mais pas d’assistanat ad vitam eternam. Et surtout, un calendrier fiable pour la reprise de l’activité du secteur. Reste à savoir si le Président de la République souhaite prendre le risque de continuer de se mettre les artistes à dos, à moins de 18 mois de la prochaine présidentielle. Dans le contexte actuel, et compte tenu des différentes crises de ces dernières années, la popularité d’Emmanuel Macron auprès des artistes apparait essentielle à sa réélection. Le soutien des artistes pourrait être un renfort efficace pour lui permettre de regagner des points dans l’opinion publique. Mais le Président se heurte à des urgences on ne peut plus imminentes, pas nécessairement compatibles avec des calculs purement politiques.

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