Le Prix Joséphine, créé en 2022, valorise une sélection de dix albums et 10 artistes. Un lauréat est désigné lors d’un évènement qui se veut le point d’orgue d’une succession d’opérations de promotion, le Prix Joséphine se définissant comme plus qu’une cérémonie. Sa vocation est de faire primer la qualité des albums sur le succès, et de favorise la découverte d’artistes pour leur développement. Un positionnement qui le distingue des autres cérémonies de récompenses en France.
Le Prix Joséphine est l’un des évènements de la rentrée pour la filière de la musique en France, les artistes et leurs partenaires, avec une cérémonie à la Maison de la radio et de la musique (Paris), le 26 septembre. Il est directement inspiré du prestigieux Mercury Prize au Royaume-Uni, et du Prix Constantin en France créé en 2002 et arrêté en 2011. Avec la découverte d’artistes et d’albums comme dénominateur commun.
“Le postulat de départ était de se dire qu’il y a de très bons albums et artistes produits en France, mais que l’on en parle pas assez. On s’est demandé comment faire pour donner davantage de place aux artistes et aux albums intéressants de l’année, pour les mettre en avant. On s’est alors dit qu’il manquait un prix dans l’industrie musicale, et qu’il fallait en créer un nouveau” explique Christophe Palatre, co-fondateur du Prix Joséphine avec Frédéric Junqua.
La découverte d’artistes étant centrale, les artistes sélectionnés et primés le sont sur la base de la qualité de leur album, et non sur le succès et les résultats d’exploitation. Une garantie d’équité, indépendamment des ventes, streams, certifications, ventes de billets, labels et partenaires affiliés. La majorité des finalistes sont des artistes en développement (Cristal Murray, Eloi), bien que les artistes confirmés (Luidji, Clara Ysé) et des têtes d’affiche (Orelsan en 2022) puissent également être sélectionnés.
Un prix pour les artistes, décerné par les artistes
Un autre marqueur de singularité porte sur le jury: les artistes ne sont ni récompensés par le public à l’instar des NRJ Music Awards, ni par un panel de professionnels comme aux Victoires de la musique. “La spécificité de ce prix est qu’il est attribué par un jury d’artistes, ce sont 10 artistes qui choisissent un palmarès de dix albums et 1 lauréat. Chaque année, on fait attention à inviter des artistes qui viennent d’horizons différents” précise Christophe Palatre, qui a longtemps travaillé aux côtés des artistes en tant que directeur du label Parlophone (Warner Music France). Le choix du jury d’artistes, présidé cette année par Disiz, est néanmoins défini à partir d’une sélection de quarante albums établie par dix journalistes de la presse généraliste et musicale. 312 albums ont été soumis par les labels et éditeurs cette année.
Plus qu’une cérémonie de récompenses
Le Prix Joséphine ne se cantonne tout de même pas à la seule cérémonie de récompenses, mais se veut le point d’orgue d’une succession d’opérations de promotion, dans l’objectif de faire découvrir les artistes et leurs albums. En amont de l’évènement, deux showcases dans une Fnac de Paris ont été organisés, et les dix albums des finalistes ont été mis en avant dans plusieurs enseignes. “Ce n’est pas juste une cérémonie, mais un parcours avec un programme. Toute l’année, nous proposons des contenus et des évènements pour que le public et les fans aient envie de découvrir ces artistes. Entre l’annonce du palmarès en juin et septembre, nous avons produit et publié dix mini-documentaires pour les finalistes, nous avons fait avec des interviews. Tout cela a vocation à inciter le public à découvrir les albums. Depuis l’an dernier, nous participons au MaMA festival en organisant des rencontres avec des jeunes pour les faire découvrir les arcanes et backstages de l’industrie” explique Christophe Palatre.
Un budget de 500 000 euros, essentiellement financé par les partenaires
La démarche de valoriser et promouvoir des artistes de tous horizons, indépendamment de leur statut et de leur succès, fait l’attractivité du Prix Joséphine auprès d’un certain nombre des partenaires majeurs de la filière de la musique. Le Prix Joséphine dispose d’un budget de 500 000 euros en 2024, essentiellement financé par les partenaires, après un financement sur fonds propres la 1ère année. L’évènement bénéficie du soutien du Centre national de la musique, du Crédit Mutuel, des organismes de gestion collective (Adami, Sacem, SPPF, SCPP), à l’exception de la Spedidam. “Le budget augmente d’année en année, à mesure que l’on attribue de plus en plus d’ambitions au prix, au niveau marketing, exposition. Cette année, tous les artistes sur scène sont rémunérés, pour leur set de 8 minutes” indique Christophe Palatre, co-fondateur du Prix Joséphine.
Un impact concret, mais une absence de diffuseur TV
Les deux premiers lauréats, November Ultra et Tuerie, ont bénéficié d’un impact concret après avoir été primés. November Ultra a par la suite été sacrée aux Victoires de la musique 2023, été reçue dans l’émission “20h30 le dimanche” sur France 2. “Les équipes d’Universal Music nous ont dit que le fait qu’elle ait eu le prix leur a permis de repartir au combat, alors que l’album était sorti depuis un certain temps. Le prix a fourni de nouveaux arguments” se réjouit Christophe Palatre. L’année suivante, Tuerie a dans la foulée été diffusé sur France Inter, été interviewé par Télérama, et augmenté son audience sur Instagram. “Le prix a contribué à ce qu’ils montent une tournée plus ambitieuse” estime Christophe Palatre. Tuerie a effectivement assuré une tournée de dix dates au printemps 2024 avec le producteur live Bleu Citron, et se produit sur la scène parisienne de La Cigale (1 300 places) le 25 septembre.
Pour autant, afin de transformer l’essai, et confirmer l’impact auprès du public pour les artistes sélectionnés et primés, le Prix Joséphine se doit cependant de disposer d’une diffusion à la télévision ou au moins sur une plateforme vidéo. Or la cérémonie, certes retransmise en live sur la radio FIP du service public (676 000 auditeurs quotidiens selon le dernier baromètre Médiamétrie), ne bénéficie pas encore de diffusion à la télévision, ni sur une plateforme. Une incohérence non des moindres, quand on connait les engagements de certains diffuseurs TV pour promouvoir et favoriser la diversité de la musique, qu’il s’agisse de France Télévisions ou du groupe M6.