Les artistes féminines encore peu présentes dans la musique, sur scène et dans les charts

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Les artistes féminines sont moins visibles que les hommes en concerts, en festivals, et moins présentes dans les titres les plus écoutés et diffusés. Les données de l’étude publiée par le Centre national de la musique sont sans appel. Pour contrebalancer les iniquités persistantes, le CNM a notamment mis en place un mécanisme incitatif pour certaines aides. La ministre de la Culture a fait part de ses inquiétudes sur le sujet, le considérant essentiel pour la vitalité et la diversité. 

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« La musique de demain sera égalitaire ou ne sera pas » a déclaré Rima Abdul Malak, à la fin de son intervention face aux acteurs de la filière, en ouverture des Assises de l’égalité dans la musique. Dans un discours résolument lucide, la ministre de la Culture a confirmé un constat alarmant indéniable à la lecture de l’étude publiée par le CNM. 

Les artistes féminines sont clairement sous-représentées en France, dans le secteur de la musique enregistrée comme la musique live.
Sur scène, elles sont trois fois présentes, avec une part de 17% dans les concerts contre 62% pour les artistes masculins, d’après des données basées sur l’année 2019.
Le rap est le genre où leur visibilité est la plus faible, avec une part de 10% de contre 88% d’hommes. Les artistes féminines sont les plus présentes dans les genres chanson / variétés où elles représentent 28% des artistes programmés en concert (62% d’artistes masculins).
Néanmoins, sur les 100 concerts avec le plus de spectateurs en 2019, les artistes masculins composaient 64% de la programmation, et les artistes féminines 16%.
Des données permettant de déduire que l’on retrouve trois fois plus d’artistes masculins à l’affiche des salles de concerts que d’artistes féminines. 

14% d’artistes féminines en festivals

L’écart de visibilité et d’accès au public pour les artistes féminines est encore plus important en festivals.
Les artistes féminines représentaient 14% de la programmation de 90 festivals français en 2019, et les hommes 86%. Soit moins qu’en Allemagne (15% d’artistes féminines), en Belgique (22%) et environ autant que dans les festivals britanniques qui comptaient 13% d’artistes féminines en 2022 d’après l’étude du Centre national de la musique. 

Le Président du CNM, Jean-Philippe Thiellay, a évoqué « une marge de progression importante dans les programmations », confirmant au passage « la survivance des stéréotypes », en introduction de la 2èmeédition des Assises de l’égalité dans la musique. Il a également précisé que l’évènement permettait de « mesurer le chemin parcouru et de creuser sillon ».

70% de la consommation en streaming captée par les artistes masculins

A l’instar de la scène, la représentation des femmes est également moindre dans le secteur de la musique enregistrée.
La consommation de la musique en streaming est largement orientée sur les artistes masculins qui captent 77% des volumes d’écoute, et les artistes féminines 14%.
Sur les 200 albums les plus vendus en 2021, moins de 40 étaient interprétés par des femmes. 

Dans le domaine de la production phonographique, l’étude du CNM précise que sur 80 000 titres commercialisés en 2021, les artistes féminines représentaient 28% et les artistes masculins 55%.
L’electro (48% d’artistes féminines) et le classique (44%) sont les seuls genres avec davantage d’artistes féminines. La variété (32%), le jazz (31%) et le R&B (28%) sont des genres où la visibilité des femmes est plus significative, une majorité d’artistes masculins.
Les femmes sont encore moins présentes dans le rap (5%), et le rock (12%). 

Les artistes féminines sont également moins exposées dans les médias.
Elles représentent 29% des 1 000 titres les plus diffusés à la radio et à la télévision en 2021 selon l’étude du CNM. La part des artistes masculin est de 59%. 

Bonus de 20% pour les aides financières

Pour inciter les labels à accroître la place des artistes féminines, des techniciennes et des directrices artistiques dans les enregistrements, le Centre national de la musique a instauré un mécanisme de bonus. Les aides éligibles sont ainsi majorées de 20% depuis 2022.
Une politique que le CNM envisage d’étendre aux aides relatives à la production de musique enregistrée, de live, ou encore à l’édition. 

La ministre de la Culture s’est également emparée du sujet. « L’égal accès des femmes aux métiers de la musique et des variétés est un enjeu vital pour la diversité, la richesse, l’avenir de la filière et j’y suis profondément attachée » a assuré Rima Abdul Malak.
La ministre a évoqué deux priorités pour « s’assurer que les femmes soient davantage programmées et visibles » : la formation, et la visibilité. Elle a insisté que la nécessité de « travailler sur l’enjeu de l’entrée en formation, l’insertion professionnelle, et la formation continue pour qu’il y ait le plus de femmes possible ».
Rima Abdul Malak a également insisté sur l’urgence de « s’assurer que les femmes vont être davantage programmées et visibles » et le devoir de « se saisir du sujet de la programmation » dans les concerts et les festivals. 

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