La France est désormais dotée d’un premier festival consacré au rap, 50 ans après la naissance du hip hop aux États-Unis. Golden Coast a rassemblé exactement 52 000 spectateurs à Dijon pour sa 1ère édition les 13 et 14 septembre, d’après les chiffres communiqués à MUSICBIZ. Un succès indéniable, compte tenu de la totalité des billets vendus pour les deux journées, des retours du public, et de l’organisation qui s’est déroulée sans encombres. Les organisateurs envisagent la 2ème édition avec optimisme et ont de grandes ambitions, en termes de développement, de croissance des recettes, de rentabilité.
Près de 50 000 billets ont été vendus pour le festival Golden Coast. Un chiffre confirmé par les organisateurs à MUSICBIZ, excluant les 2 000 invités et accrédités. Booba, SDM, Ninho, la Fonky Family et Josman étaient les têtes d’affiche du festival. “Nous sommes plus que contents avec l’équipe et nos partenaires Combat, Believe et Play Two. Cette première édition est plus que positive, avec de bonnes ventes de billets, un engouement du public, des artistes, des médias” commente Christian Allex, directeur du festival.
Ce pari gagnant est l’aboutissement d’un projet démarré il y a plusieurs années, parti de la volonté de répondre à une réelle demande, et de rectifier l’absence de festival 100% rap en France, comme il existe aux États-Unis (Rolling Loud), en Angleterre (Wireless), en Belgique (Les Ardentes). ”On ne comprenait pas qu’il n’y ait pas un grand évènement purement dédié au hip-hop en France. On a donc commencé à travailler sur le festival en 2020, au début du Covid. On ne savait pas trop ce que notre métier allait devenir, ni ce qu’on allait faire, alors on a profité de ce temps d’arrêt pour commencer ce projet auquel on pensait depuis un moment” explique Christian Allex.
Trois ans plus tard, le projet s’est concrétisé, à l’été 2023, avec l’avancée des négociations avec Believe et Play Two, et un accord conclu en juillet. Un autre partenaire potentiel intéressé, s’est finalement retiré, Live Nation France. L’annonce de la création de Golden Coast à l’automne 2023 avait suscité un engouement rarement vu pour un festival, qui s’est confirmé dès la mise en vente des billets. Fin juillet, soit un mois et demi avant l’évènement, 90% des pass 2 jours avaient été vendus, et plus de 75% des pass 1 jour.
70% de festivaliers venus hors de la région
Sur les 50 000 festivaliers, 70% provenaient d’une région extérieure à la région Bourgogne-Franche-Comté, soit 35 000 spectateurs. 50% du total des spectateurs sont venus depuis la région parisienne. “Après Paris, Lyon et le sud, il y a eu des festivaliers venus de toute la France, d’Angleterre, du Canada… Ce qui confirme que tout le monde voulait bien un festival de rap en France” se réjouit Christian Allex. L’importance des publics provenant des régions extérieures préfigure de la marge de progression possible pour la fréquentation du festival, autant en provenance des principales villes, que de la région et des alentours. “Il y a donc un gros appel des publics extérieurs, et en même temps cela nous oblige à fédérer autant en local, il y a donc des publics à aller séduire” relève le directeur de Golden Coast.
La venue de plus de 30 000 spectateurs résidant hors de la région a évidemment profité aux secteurs du tourisme, de l’hôtellerie, de la restauration, compte tenu des dépenses des festivaliers en termes de transport, de logement, d’alimentation, de consommation. La contribution du festival à l’économie du territoire est d’ores-et-déjà conséquente. “Le festival a effectivement eu des retombées économiques assez fortes, puisque les hôtels et les trains étaient bien remplis. Ce sont des publics complémentaires aux touristes notamment les seniors qui sont nombreux dans la région Bourgogne à cette période. Nous rencontrons bientôt les partenaires et acteurs locaux pour évaluer et estimer avec exactitude ces retombées” confirme Christian Allex.
5 millions d’euros de budget
Pour la 1ère édition, Golden Coast disposait d’un budget d’envergure, 5 millions d’euros. Le festival est principalement financé par les recettes propres, entre ventes de billets et sponsoring entre autres. La billetterie représente plus de 75% du budget global soit environ 3,5 millions d’euros. “Nous avons eu le soutien de Dijon Métropole, avec une subvention équivalente à 8-10% de notre budget” ajoute le directeur de l’évènement. Les revenus tirés du sponsoring par les marques et entreprises sont équivalents à 10% du budget, soit 500 000 euros.
Augmentation des recettes propres
Le développement des recettes propres fait partie des principaux objectifs pour la 2ème édition. L’ajout d’un 3ème jour, que les associés ont acté fin septembre, devrait grandement contribuer à garantir l’augmentation des revenus et à garantir l’indépendance du festival. Les organisateurs misent également beaucoup sur la croissance des recettes de sponsoring, en raison de l’attractivité du festival notamment auprès des marques, du fait de la présence de dizaines de milliers de jeunes publics, et d’un public multigénérationnel, multiculturel. “Nous pensons pouvoir fédérer et fidéliser un certain nombre de marques et entreprises, de sorte à doubler l’enveloppe des partenariats l’année prochaine” estime Christian Allex. La banque LCL a sponsorisé le festival, dans le cadre d’une stratégie visant à gagner en attractivité auprès des jeunes, et d’une contre-offensive face au Crédit Mutuel sur le terrain de la musique, la banque qui « donne le La » étant massivement présente dans les festivals.
La rentabilité, condition sine qua none pour la pérennité
La 1ère édition a certes été un succès sur le plan de la fréquentation, de l’engouement, de l’expérience des festivaliers et des artistes, mais elle a été largement déficitaire sur le plan financier. “Avec une jauge de remplissage autour de 100%, nous avons perdu énormément d’argent, d’abord parce que le festival a eu lieu sur deux jours, mais nous nous y attendions. Un festival coûte tellement cher à organiser que si nous voulons qu’il soit rentable ou au moins à l’équilibre, il nous faut l’organiser sur le plus de jours possibles” concède Christian Allex. Les organisateurs ont néanmoins la rentabilité en ligne de mire, et ce à court-terme. Ce qui serait un exploit pour un nouveau festival. « Nous pensons atteindre la rentabilité d’ici la 3ème édition. Nous avons tout de même déjà une bonne maîtrise de nos dépenses, et dès la 2ème édition, nous en aurons une meilleure. L’ajout d’un 3ème jour devrait nous permettre de bien diminuer nos pertes, cette édition sera donc stratégique” précise Christian Allex, directeur du festival Golden Coast. Outre l’inflation et la prééminence des cachets des artistiques, le festival a d’office fait face à d’importants coûts sur les postes de sécurité et de sûreté, qui représentent entre 25 et 30% des dépenses.
La pérennité du festival Golden Coast n’est donc pas encore garantie. La nette croissance de la fréquentation, qui se produira mécaniquement avec l’ajout d’un 3ème jour, devrait permettre d’optimiser les recettes. De même que l’augmentation du nombre de marques et entreprises parmi les sponsors. Cependant, pour s’inscrire dans la durée, et s’ancrer dans le paysage des festivals, la rentabilité se devra doit être atteinte ou au moins proche à moyen terme. Une condition sine qua none pour que le festival se poursuive au-delà de trois éditions.