Centre national de la musique : la contribution des plateformes de streaming privilégiée à la taxe

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Le financement du Centre national de la musique reste une équation à résoudre. Le gouvernement privilégie désormais la contribution volontaire, par les plateformes de streaming en particulier, en plus des organismes de gestion collective. L’instauration d’une taxe sur les plateformes n’est pour autant pas exclue, à défaut d’engagements à la hauteur des besoins de l’établissement.

Ni les échanges et tractations des parlementaires, ni les déclarations publiques et plus ou moins remarquées des organisations professionnelles de part et d’autre, n’auront finalement fait émerger de solution et de garantie pour le financement du Centre national de la musique. Le projet de loi de finances 2024 défendu par le Gouvernement, écarte le principe d’une taxe obligatoire sur les plateformes de streaming.

Un budget 2024 assuré par une subvention de 28M, la taxe, et la contribution des OGC

Pour l’heure, le financement du CNM en 2024 sera de prime abord assuré par la subvention du ministère de la Culture à hauteur de 28,2 millions d’euros. Un montant en hausse de 510 000 euros sur un an, notamment pour compenser l’inflation sur les charges de fonctionnement.
Le budget de l’établissement sera également abondé du produit de la taxe sur la billetterie des spectacles (33,5 millions d’euros en 2023), et par une contribution d’au moins 3 millions d’euros des cinq organismes de gestion collective dans le secteur de la musique (Sacem, SCPP, Adami, SPPF, Spedidam).

La ministre de la Culture, auditionnée par les députés de la Commission des affaires culturelles, a rappelé “l’importance” du Centre national de la musique, et “le besoin” d’asseoir son financement. Rima Abdul Malak a souligné “une question de principe” pour justifier l’octroi de sources complémentaires, précisant que “le budget CNM n’est pas alimenté ou pas suffisamment par la musique enregistrée et les plateformes de streaming payantes et gratuites”.
La ministre a également fait valoir un enjeu de “volume de financement pour pouvoir faire face aux défis de l’innovation, l’intelligence artificielle, l’export ou la transition écologique dans les années qui viennent”.

Participation des plateformes avec plusieurs millions d’euros

Les besoins du Centre national de la musique sont estimés à plusieurs dizaines de millions d’euros. “Une cinquantaine”, avançait le Président Jean-Philippe Thiellay, fin 2022. L’établissement a bénéficié en 2023 de financements exceptionnels pour 75 millions d’euros, des crédits dont le budget 2024 ne sera en théorie pas abondé.
La solution privilégiée par le gouvernement, et sur laquelle s’accordent plusieurs plateformes, consiste en une contribution volontaire de ces dernières. La participation des plateformes de streaming de la musique s’ajouterait dès 2024 à celle des organismes de gestion collective précités, élargissant ainsi le panel des contributeurs.
L’autre objectif est de faire croître le montant des contributions respectives. Plusieurs des organismes de gestion collective sont favorables à augmenter l’enveloppe attribuée au CNM, à condition d’un accord ambitieux actant une contribution non des moindres des plateformes de streaming.
Le montant total de la contribution reste encore incertain, mais il devrait logiquement être de plusieurs millions d’euros.

Spotify et Deezer font partie des plateformes favorables au dispositif. “On ne fait pas semblant de faire des propositions. L’idée est d’arriver à quelque chose qui permette de satisfaire les besoins” assurait Antoine Monin, directeur général de Spotify France et Benelux et Vice-Président de l’ESML, fédération des plateformes, lors d’une prise de parole informelle en réaction à l’annulation du débat prévu entre partisans et opposants de la taxe au MaMA à Paris.
Un consensus doit cependant émerger sur les engagements en termes de montants, avec certainement des variations en fonction du chiffre d’affaires et du modèle économique, ainsi que sur la liste des plateformes confirmant engager des financement. Sont notamment sollicitées et attendues les plateformes de streaming américaines, en l’occurence Apple Music, YouTube, et Amazon Music entre autres. Ce qui s’explique de fait par leur prééminence en tant qu’acteurs majeurs de l’économie en France et dans les habitudes de consommation de la musique, en particulier pour YouTube, ainsi que leur de potentiel de croissance pour Apple Music et Amazon Music notamment.
En l’attente d’un accord formel, le caractère effectif de cette option pour 2024 n’est pas encore confirmé. Fin octobre, elle était encore qualifiée d’“hypothèse” par la ministre, expliquant brièvement aux députés: “il nous a semblé opportun de pousser jusqu’au bout pour voir jusqu’où cette proposition pouvait aller et si elle pouvait se rapprocher de ce qui était attendu dans le cadre de la contribution obligatoire”.

La taxe streaming envisagée à défaut d’un accord

Les discussions suivent leur cours avec un certain nombre de plateformes de streaming, et surtout les leaders sur le marché en France. Y compris avec le gouvernement, comme l’a confirmé Rima Abdul Malak aux députés de la commission des affaires culturelles, qui affirmait être encore “dans une discussion intense avec les plateformes qui avance”.
La solution d’une taxe obligatoire à laquelle toutes les plateformes de streaming serait assujetties n’est cependant pas définitivement écartée. La ministre l’a également confirmé lors de la défense de son budget 2024 devant les parlementaires.

Le gouvernement a néanmoins confirmé qu’il actionnera l’instauration d’une taxe obligatoire pour l’ensemble des plateformes de streaming pour assurer le financement du Centre national de la musique, à défaut d’un accord associé à des engagements conséquents.
Un arbitrage qui s’inscrirait alors en pleine cohérence avec la déclaration du Président de la République Emmanuel Macron le 21 juin dernier, jour de la Fête de la musique.

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