Le Président de la République a clôturé le 20 juin le Sommet de la France Music Week, évènement où plusieurs dizaines de dirigeants et acteurs du music business étaient présents. Dans un discours de quinze minutes à l’Élysée, Emmanuel Macron a fait part du grand objectif au coeur de son ambition de “replacer la France sur la carte mondiale de l’industrie de la musique“ avec l’organisation de la France Music Week. Il s’agit de favoriser et d’inciter les investissements des entreprises en France, dans le secteur de la musique.

La reconnaissance de la musique en tant que secteur de l’économie, allant de pair avec sa contribution à l’économie du pays, et comme vecteur de rayonnement à l’international, est le principal point positif de la France Music Week. Emmanuel Macron s’est d’abord adressé aux entrepreneurs du music business lors de son discours. Plusieurs entrepreneurs emblématiques étaient présents, dont Denis Ladegaillerie (Believe), Stephan Bourdoiseau (Wagram Stories), Emmanuel de Buretel (Because Music), Olivier Darbois (Corida), ou encore Pascal Nègre (6&7 ; Hashtag NP).
En organisant un France Music Week Summit, le Président souhaite à la fois encourager les entreprises françaises et internationales à investir dans le secteur de la musique en France, à l’instar du Choose France Business Summit organisé chaque année depuis 2018, au cours duquel de nombreuses annonces sont faites. “Nous voulons inciter à choisir la france pour la musique autant que pour d’autres secteurs, c’est un de mes grands objectifs. Cette Music Week fait sens parce que nous accueillons de nombreux entrepreneurs. Nous avons été le pays le plus attractif en Europe durant les six années précédentes. Mais nous pouvons faire mieux en termes d’attractivité“ a déclaré le Président de la République dès le début de son allocution, notamment devant Robert Kyncl (CEO de Warner Music Group) et John Reid (President Live Nation EMEA).
Reste à savoir si des entreprises européennes, américaines, asiatiques, ou encore du Moyen-Orient franchiront prochainement le cap d’investir en France dans le secteur de la musique, et si les majors Universal Music, Warner Music et Sony Music augmenteront leurs investissements via leurs filiales françaises. Aucune annonce en ce sens n’a été faite pendant et après la France Music Week. L’annonce de l’acquisition des société de production live de Fimalac Entertainment par le fonds d’investissement Trévise Participations (basé en Suisse), et des salles du groupe par GL Events, en cours de négociation, va plus ou moins en ce sens, bien qu’ayant été faite en marge de la France Music Week.
Développer et faire évoluer le financement du CNM
La politique d’Emmanuel Macron pour favoriser et inciter les investissements dans le secteur de la musique se décline en deux grands axes. Le premier est structurant avec le financement du Centre national de la musique, qu’il souhaite sanctuariser et développer pour le faire converger avec le Centre national du cinéma (CNC). “Nous supportons la diversité et la richesse des artistes, de nos festivals sur l’ensemble du territoire, et nous voulons préserver les labels indépendants. Nous voulons réussir à faire pour la musique ce que nous avons fait pour le cinéma, préserver la diversité et le financement de cette industrie. Nous voulons garantir l’équilibre du financement du Centre national de la musique et progressivement évoluer vers un modèle équivalent au CNC, c’est ce qui fait sens pour vous tous“ a affirmé le Président de la République. Une déclaration qui soulève d’office des questions quant aux nouvelles sources de financement du Centre national de la musique qui pourraient être mises en place, et quant à l’évolution des dispositifs existants, un an et demi après la création de la taxe streaming.
Accompagner les investissements des entreprises
Le second axe porte sur les investissements des entreprises, que le Gouvernement entend favoriser, encourager, optimiser à horizon 2030. Et ce notamment dans la perspective de croissance des secteurs de la musique enregistrée et de la musique live, avec donc une contribution à l’économie mécaniquement amenée à progresser. En ouverture de la France Music Week, la ministre de la Culture Rachida Dati a annoncé un plan de financement à hauteur de 500 millions d’euros sur les cinq prochaines années, accessible aux entreprises du secteur de la musique. Emmanuel Macron considère que ce dispositif “permettra de consolider le financement de l’industrie de la musique, et d’accompagner la dynamique à l’export“.
Optimiser l’export de la musique made in France
Le développement de l’export de la musique “made in France » est effectivement une priorité majeure pour le Président de la République et le gouvernement, conscients que la musique est un des principaux vecteurs de rayonnement pour la France, sa culture et sa langue. Une réalité qui alimente l’optimisme des acteurs de la filière musicale et des décideurs politiques, mais qui ne doit pas masquer le véritable enjeu: prendre une place d’envergure sur la scène internationale, à l’instar des artistes asiatiques, américains et latino-américains, à l’heure où l’appétence des consommateurs pour la musique est plus forte que jamais. “Nous voulons donc aider nos acteurs clés à bénéficier de cette dynamique globale, nous souhaitons accompagner nos acteurs à s’exporter“ a affirmé Emmanuel Macron.
À l’échelle internationale, les artistes français sont loin derrière, malgré quelques succès (Stromae, Aya Nakamura, David Guetta, Gims…) étant indéniablement des exceptions et non représentatifs de la dynamique globale et du potentiel de la musique made in France. Actuellement, seuls deux artistes français sont dans le top 200 des artistes avec le plus d’auditeurs mensuels sur Spotify: David Guetta (13ème) et DJ Snake (88ème), dont les succès sont presque toutes des collaborations avec des artistes internationaux et notamment américains. Aucun artiste français n’est dans le top 100 des artistes les plus écoutés sur la plateforme de streaming leader dans le monde durant la semaine du 13-19 juin, et Jul est le seul artiste français dans le top 200 (118ème). De surcroît, la popularité de certains artistes français sur la scène internationale s’avère surtout être une conséquence de leur popularité sur les réseaux sociaux (Instagram, TikTok) et de la conquête de certains publics dans d’autres marchés avec certains hits, que le résultat des stratégies prétendument mises en place par leurs labels.
Jason Moreau, Executive Editor, MUSICBIZ